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Zoom sur… Le Massif Central, terre d’élevage
Plus grande prairie d’Europe, le Massif central est un territoire où l’élevage herbivore est roi. Cette vaste zone située au coeur de l’Hexagone abrite des filières aussi diversifiées que ses paysages.
Entité administrative répartie dans quatre régions et dans 22 départements (en partie ou en totalité), le Massif central s’étend sur 85 000 km2, soit près de 15 % de la surface nationale. Dans ce territoire, dont les deux tiers sont situés en zone de montagne, l’agriculture est un secteur clé de l’économie. L’élevage, en particulier, a une place importante. Les systèmes d’élevage du Massif central sont divers, mais ils sont, dans leur très grande majorité, extensifs de ruminants et sont fondés sur les prairies, sur les landes et sur les parcours qui caractérisent l’agriculture du massif. Cette zone compte 4,1 millions d’hectares de SAU, incluant 85 % de surfaces en herbe dont 60 % toujours en herbe, faisant d’elle la plus grande prairie d’Europe. 85 % du territoire sont destinés à l’élevage d’herbivores, avec 38 % des exploitations orientées en bovin viande, 20 % en bovin lait et 16 % en ovin/caprin (répartition des exploitations par Otex).
L’élevage bovin a une place de choix
Avec 4,4 millions de têtes, l’élevage bovin représente l’activité dominante : elle concerne plus d’une exploitation sur deux, et 62 % des exploitations professionnelles. Les productions bovines comprennent tout d’abord les animaux vivants, destinés principalement à l’engraissement et à la reproduction. Les animaux destinés à l’engraissement se répartissent entre veaux, génisses et broutards, ces derniers constituant une production majeure du Massif central : les animaux maigres représentent près de 60 % de ceux commercialisés par les élevages de bovins. Les autres animaux abattus et commercialisés en viande sont les produits issus de l’élevage laitier, dont les vaches laitières de réforme, et ceux issus de l’élevage allaitant, incluant également des animaux réformés, des boeufs, des génisses et des veaux. Au coeur du Massif central, deux races locales bovines allaitantes ont leur berceau : la race aubrac et la race salers. Pour ces produits du troupeau allaitant, des appellations d’origine protégée (AOP), des indications d’origine protégée (IGP) et des labels Rouges permettent d’apporter un surplus de valeur ajoutée à l’éleveur.
La production de lait de vache, de son côté, représente 20 % des exploitations du territoire et se concentre à 94 % dans les zones de montagne. Selon FranceAgrimer et l’Idele, la production de lait de vache dans le Massif central dépassait, en 2014, 2,1 milliards de litres. 60 % de cette production deviennent des fromages, dont certains à forte renommée. Ils se répartissent entre les pâtes pressées non cuites, pour un peu plus de 50 %, les pâtes persillées, pour 20 %, et le reste pour les autres fromages (pâtes pressées cuites et fromages frais). Le lait conditionné et les autres produits (beurre, crème, yaourts et desserts lactés) représentent chacun environ 20 % de la production. Le Massif central abrite une production d’ovins et de caprins estimée à 3,2 millions de têtes, dont 55 % de brebis laitières. La production ovine laitière (deux tiers de la production nationale de lait de brebis) côtoie la production d’agneaux (40 % de la production nationale), caractérisée par une assez forte proportion des ventes sous signe de qualité (au moins six IGP).
Des filières créatrices de valeur ajoutée
Toutes ces productions sont issues d’élevages à l’herbe faisant fréquemment appel au pastoralisme, et sont créatrices de valeur ajoutée pour le territoire. La lacaune, première race ovine française en effectif, domine notamment au sud du massif. Elle se caractérise par l’existence de deux rameaux, l’un laitier, l’autre viande. Elle est connue et reconnue pour son lien avec la filière roquefort, le rameau viande étant quant à lui fortement impliqué dans la production d’agneaux fermiers sous la mère. De nombreuses autres races locales ovines allaitantes occupent le massif telles que la causse du Lot, l’emblème de l’agneau du Quercy (label Rouge), ou encore la blanche du Massif central, la bizet, la grivette, la limousine, la noire du Velay ou la rava.
—— Danielle BODIOU (Tribune Verte 2947)
Pour tout savoir sur la filière de la production animale
Bruno Douniès, coordinateur de l’association Porc Montagne « UNE PRODUCTION PORCINE GLOBALEMENT STABLE »
« Le Massif central est un territoire à faible densité porcine, marqué par des élevages de taille variable (de 60 à 1 000 truies), dont les deux tiers sont situés en zone de montagne. La production annuelle, d’un million de porcs charcutiers (soit 4,5 % de la production nationale), demeure globalement stable depuis une dizaine d’années. Elle est assurée par 1 500 éleveurs, dont un millier produit plus de 50 porcs par an. Les systèmes de production y sont majoritairement mixtes, porcins et herbivores, plus impliqués dans l’engraissement (60 %) que dans le naissage (40 %).
De nombreux éleveurs porcins du Massif central sont organisés en groupements de producteurs et sont impliqués dans une démarche qualité, marque caractéristique d’une filière qui cherche à tirer la meilleure valorisation des porcs pour compenser les écarts de coûts de production avec les grandes zones de production. La production porcine est par ailleurs essentiellement transformée en produits de salaison sèche (jambons secs, saucissons…)
Née en 1996, l’association Porc Montagne réunit différents acteurs de la filière porcine (producteurs, abatteurs/découpeurs, salaisonniers…) du Massif central ayant pour point commun d’être situés en zone de montagne, territoire aux nombreuses contraintes géographiques et climatiques qui fragilisent économiquement la filière. Elle a pour objets la représentation des adhérents auprès des pouvoirs publics, la promotion de la qualité des produits, la valorisation de l’image de la viande porcine et des produits de charcuterie issus des filières porcines de montagne ainsi que la conduite de programmes de recherche au service des acteurs de la filière porcine de montagne. L’association, qui mène actuellement un programme de recherche nommé Aporthe (lire
ci-dessous), travaille également à la mise en place d’une politique de certification environnementale des exploitations de montagne. »
Complémentarité : LE PROGRAMME APORTHE
Sur les 1 000 éleveurs de porcs présents dans le Massif central, 90 % détiennent également des bovins. Ces derniers souhaitent maintenir cette mixité pour des raisons économiques (revenu, travail, trésorerie) et locales (tradition d’élevage, outils de transformation…). L’élevage porcin présente une grande complémentarité avec l’élevage bovin, tant par la solidité économique de ces systèmes que dans la gestion des effluents d’élevage. Cependant, leur structure, leur fonctionnement et leurs perspectives d’avenir sont très peu connus. Lancé en 2019, Aporthe est un programme de recherche qui vise à développer les savoirs en matière de complémentarité des ateliers porcins et bovins dans les élevages du Massif central. Il a pour but d’améliorer la valorisation des effluents porcins en zone herbagère d’altitude, complémentairement aux fumures bovines, et de promouvoir la résilience des systèmes mixtes porcins-bovins dans la diversité des situations territoriales du massif, afin de faciliter leur transmission, leur modernisation et leur contribution à l’économie locale. Les données recueillies permettront de mettre en avant et de valoriser les externalités positives des élevages porcins dans le Massif central, et notamment d’en faire un moyen d’image dans les démarches de valorisation.