Témoignages : Ils se forment loin de chez eux

Témoignages : Ils se forment loin de chez eux

Trois étudiants étrangers venus se former en France nous partagent leurs expériences. Ils ont avant tout choisi notre pays pour la qualité des enseignements ou des sujets proposés par leurs structures d’accueil.

— Caroline EVEN (Tribune Verte 2976)

Audrey Labonte, doctorante belge à l’Inrae (Dijon) : ÉTUDIER LES RELATIONS PLANTES SAUVAGES-POLLINISATEURS

Depuis octobre 2019, Audrey Labonte travaille au sein de l’UMR Agroécologie Inrae du centre de Dijon en tant que doctorante. Après un master « bioingénieur gestion des forêts et des espaces naturels » réalisé à Gembloux Agro-Bio Tech (une faculté de l’université de Liège), cette jeune belge francophone, originaire de la région Wallonne, souhaitait poursuivre ses études et plus particulièrement travailler sur les relations entre plantes sauvages et pollinisateurs. C’est en découvrant le sujet de thèse de son futur directeur du centre Inrae de Dijon qu’elle a été motivée pour postuler en France. « En première année de thèse, j’ai identifié beaucoup d’insectes pollinisateurs. Puis le confinement est arrivé et mon travail a été un peu restreint. À l’été 2020, j’ai ensuite fait un peu de terrain en allant capturer des pollinisateurs. L’objectif de ma thèse est en effet de comprendre comment le paysage influence les réseaux d’interactions entre plantes et pollinisateurs. Cette année, j’ai commencé à identifier les pollens des insectes capturés, et actuellement, j’analyse les statistiques. Je commencerai bientôt la rédaction de mon premier article », résume-t-elle. Ce n’est pas la première fois qu’Audrey Labonte vient en France dans le cadre de ses études. Lorsqu’elle était en master, elle a réalisé deux stages de courtes durées au CNRS en Isère et dans les Hautes-Alpes. Avec cette thèse, elle s’engage toutefois sur une plus longue période, avec une soutenance envisagée en mars 2023. Hormis la première période de confinement passée à Dijon, son séjour en France se passe bien. Elle s’estime bien intégrée au sein d’une équipe de recherche internationale (avec des collègues belge, espagnol, chinois, tunisien, ou encore anglais), où règne l’entraide. « Je suis bien tombée. Mais je conseillerais à des étudiants en master 2 voulant faire une thèse d’essayer de contacter les doctorants du directeur de thèse pour voir comment cela se passe », suggère-t-elle. Aux étudiants étrangers voulant venir en France, elle les avertit par ailleurs sur les nombreuses démarches à effectuer : « Préparez-vous à l’administratif ! Au tout début, il faut trouver un logement, ouvrir un compte bancaire, obtenir un numéro de sécurité sociale… Des fois, ça tourne en rond dans les demandes auprès de l’administration. C’est un peu compliqué, mais heureusement l’université de Dijon a été compréhensive. »

Assandoa Dorcas Affian, étudiante ivoirienne à l’Institut Agro | Montpellier SupAgro : AIDER LES AGRICULTEURS À MIEUX VALORISER LEURS PRODUCTIONS

Depuis la rentrée 2021, Assandoa Dorcas Affian poursuit ses études en 2e année du master international « sciences et technologie de l’agriculture, de l’alimentation et de l’environnement, parcours marchés, organisations, qualités et services en appui aux agricultures du Sud » (Moquas) proposé par l’Institut Agro | Montpellier SupAgro. L’étudiante ivoirienne s’est dirigée vers cette formation après avoir obtenu une licence « économie et gestion agropastorale » et un master « management des entreprises et organisations agropastorales » au sein de l’université Peleforo Gon Coulibaly, située au nord de la Côte d’Ivoire. « Au cours du master, je réfléchissais à poursuivre par un doctorat ou à suivre une formation, se rappelle-t-elle. Avant d’aider les agriculteurs ivoiriens à vendre leurs produits, il me fallait une formation pour mieux comprendre les marchés ! […] J’ai lu le livret pédagogique du parcours Moquas qui m’a paru très intéressant. Je me suis alors lancée dans les démarches administratives. Comme c’était un peu compliqué financièrement, j’ai cherché une bourse pour m’aider à prendre en charge mes frais en France. Grâce à la bourse d’étude du gouvernement français que j’ai obtenue, je suis arrivée à Montpellier en août 2020. » Un an après des débuts assez compliqués (marqués notamment par les périodes de confinement), l’étudiante ivoirienne se sent aujourd’hui bien intégrée. S’agissant des enseignements reçus dans le cadre de son parcours Moquas, ceux-ci correspondent pleinement à ses attentes : « Nous avons étudié, dans le cadre d’une unité d’enseignement, les différents types d’agriculture. Cela nous permet de mieux comprendre le monde agricole. Nous avons également eu des cours sur la manière d’aider les organisations de producteurs à avoir accès aux ressources du marché. » Depuis peu, Assandoa Dorcas Affian a commencé à chercher son stage de fin de master qui débutera en avril prochain. « Après mes études, j’aimerais mettre en place toutes les connaissances et compétences acquises en France ou ailleurs, explique-t-elle. Car, lorsque je retournerai en Côte d’Ivoire, je veux travailler à mon propre compte. »

Amadou Ba, étudiant sénégalais à l’Ihedrea (Paris) : ACQUÉRIR DE L’EXPÉRIENCE DANS L’AGROMANAGEMENT

Depuis la rentrée 2021, Amadou Ba, originaire du Sénégal, étudie au campus parisien de l’école d’agromanagement Ihedrea. Il est en première année du cursus MBA affaires internationales agricoles et agroalimentaires (niveau Bac + 5). Plusieurs facteurs l’ont motivé pour postuler à l’Ihedrea : le volet international, la langue française et la possibilité de suivre la formation en alternance. « Au Sénégal, il y a énormément d’étudiants diplômés, mais qui peinent à trouver du travail. Avec l’alternance proposée par l’Ihedrea, cela nous ouvre des portes, estime Amadou Ba. Cette année, je suis en formation initiale, mais pour l’année prochaine, je recherche une entreprise pour l’alternance avec l’appui de l’Ihedrea. » Dans le cadre de la formation initiale, il suit actuellement des cours en droit. « C’est nouveau en matière d’expérience, étant donné que le droit durant ma licence professionnelle (LP) portait sur la législation sénégalaise. Heureusement, les professionnels qui nous dispensent les cours nous mettent dans le bain à travers des cas réels », explique-t-il. Amadou Ba a connu l’Ihedrea grâce à FIGS Éducation, un service d’admission international qui représente 22 écoles en France. « Ils m’ont présenté l’école et ont facilité les démarches administratives », indique-t-il. Il a candidaté avec, dans ses bagages, une LP « sciences agroalimentaires, spécialité agronomie et production végétale » de l’université Amadou Hampaté Ba de Dakar. Lors de son stage de LP mené au sein de la ferme sénégalaise Taaru Askan, spécialisée dans la production de fruits et légumes bio, il a notamment géré les cultures de choux palmiers et frisés. Puis, il a été rappelé après son stage pour aider la ferme sur des aspects plus liés au management, à la logistique et à la comptabilité. « Le problème au Sénégal, c’est que le bio n’est pas subventionné par l’État, ce qui rend la survie des fermes biologiques difficiles, même si ces dernières réalisent une plus-value non négligeable », constate-t-il. En parallèle, en travaillant au sein d’Africa carbon and commodities (une filiale sénégalaise d’AitherCO2), il s’est intéressé aux crédits carbone. « Certains agriculteurs, pratiquant certes une agriculture archaïque, font du bio, mais sans le savoir, raconte-t-il. En poursuivant mes études, mon objectif est d’acquérir de l’expérience pour aider à la création d’entreprises et pour apporter un volet bio à l’agriculture sénégalaise ! »