Grégory Daude, Gaec du chemin de l’espoir : Comment devenir de plus en plus autonome ?
Être exploitant en fauteuil roulant demande ténacité et inventivité. Grégory Daude, agriculteur dans le Cantal, nous raconte.
Fils d’éleveurs dans le Cantal, Grégory Daude souhaitait devenir ébéniste, mais le sort en a décidé autrement. Victime d’un accident de moto à l’âge de 16 ans, l’école qu’il voulait intégrer ne peut le recevoir. Il entre alors au lycée agricole Louis Mallet de Saint-Flour (15), qui accepte les étudiants en fauteuil roulant, obtient un BEP puis un BTSA à l’École nationale des industries du lait et des viandes d’Aurillac (15). Lors de son installation, en 2013, l’exploitation ne peut pas être agrandie, en raison de sa situation, mais un atelier de fabrication de glaces artisanales est créé et géré par Simone Daude, sa mère et associée. L’entité juridique s’appelle le Gaec du chemin de l’espoir. Tout un programme que le jeune agriculteur a à coeur de mettre en oeuvre. L’exploitation est alors aménagée : un bâtiment neuf est construit, la salle de traite est agencée pour qu’il puisse traire les cinquante vaches. Cette année, le rachat d’un second tracteur et d’une nouvelle grue, qui lui permet de monter et de descendre de l’appareil, va le rendre encore plus autonome. Ainsi, il ne fera plus appel à son frère, à ses parents ou au saisonnier pour atteler ou pour dételer le matériel à chaque fois qu’il souhaite changer d’outils de travail du sol. La grue est un investissement de 12 000 euros. Une aide lui sera-t-elle octroyée ? À ce jour, il attend la réponse de l’Agefiph (association de gestion du fonds pour l’insertion professionnelle des personnes handicapées), alors que le matériel est déjà acheté. Le principe consiste à subventionner un outil lorsqu’il est utilisé uniquement par la personne handicapée. C’est la raison pour laquelle peu d’aides lui ont été octroyées au moment de l’installation. Pour mener les bêtes du champ à l’étable, Grégory s’est doté d’un quad avec cabine et volet. Dans certains cas, il demande de l’aide pour manipuler les bêtes. Les récoltes sont effectuées par ses soins, mais pour l’ensilage et les semis de maïs, il fait appel à une entreprise agricole.
Gestion et diversification
En règle générale, la conduite de la ferme demande une organisation très calculée puisqu’une aide, souvent ponctuelle, est encore nécessaire pour réaliser les travaux. « Nous commençons souvent le matin, vers 10 heures, et nous terminons au-delà de 19 heures », spécifie Grégory Daude. Passionné de génétique, l’éleveur achète rarement des vaches pour faire évoluer son troupeau. La coopérative Altitude, à laquelle adhère le Gaec, apporte son soutien. Les conseillers et les commerciaux s’adaptent, et les mécaniciens répondent rapidement lorsqu’un matériel est défectueux. L’atelier de transformation, construit en 2015, un an avant l’échéancier déterminé avec les banquiers pour bénéficier d’aides maximums, a produit l’an passé 1 200 litres de glaces vendues. Cette année, la production, qui va doubler, est vendue à la fois à la ferme, au magasin de producteurs d’Altitude, aux collectivités, aux restaurants, mais aussi à l’occasion de fêtes villageoises. « Sans cette diversification, affirme Grégory Daude, qui représente entre 10 et 20 % de notre chiffre d’affaires, la ferme n’existerait plus. Nous avons traversé de nombreuses difficultés depuis notre installation. Des pertes d’animaux ont été subies en raison d’un problème avec le béton du bâtiment. La sécheresse a succédé à la crise du lait en 2015-2016. » L’expérience de Grégory intéresse d’autres personnes handicapées. Deux personnes, dont un agriculteur, sont venues s’informer sur sa ferme.
—— Marie-Dominique GUIHARD (Tribune Verte 2917)
Bio express
- Gaec du chemin de l’espoir, basé à Saint-Flour (15).
- 50 vaches laitières (race montbéliarde).
- 85 ha de SAU, dont 6 ha de céréales, 6 ha de maïs, 15 ha de prairies temporaires et 58 ha de prairies naturelles.
- Commercialisation à la coopérative Altitude (AOP bleu d’Ambert et bleu d’Auvergne).
- Membre du bureau des Jeunes Agriculteurs du Cantal.