- Environnement

Gérer l'eau pour mieux l’utiliser

Gérer l'eau pour mieux l’utiliser

Accompagner les agriculteurs et les territoires dans une meilleure gestion de l’eau. C’est l’une des grandes missions des chambres d’agriculture. Grâce à différentes méthodes comme l’expertise des conseillers, un outil d’aide à la décision et des projets territoriaux, les conseillers des chambres guident les agriculteurs pour toujours mieux utiliser cette ressource.

«La bonne dose au bon moment » rappelle la chambre d’agriculture du Loiret à propos de l’eau. En effet, les chambres d’agriculture ont une mission de conseil auprès des agriculteurs sur la gestion de la ressource. Ainsi, les animateurs et conseillers agricoles disposent de différentes méthodes pour guider les agriculteurs dans le pilotage de leur irrigation.

« Nos conseillers proposent leur expertise pour identifier les besoins des cultures et la disponibilité en eau dans les sols », explique Benoît Louchard, chef d’équipe eau-environnement à la chambre d’agriculture du Loiret. Ils réalisent notamment des bilans hydriques pour les agriculteurs afin de connaître la réserve en eau disponible dans les sols. « Pour l’identifier, on considère les apports (les précipitations, les pratiques d’irrigation) et les pertes (l’évapotranspiration) dans les sols ainsi que les capacités de rétention des sols (réserve utile) », définit Benoît Louchard.

« Si l’agriculteur a des questions plus poussées qui nécessitent d’aller sur le terrain, nous avons des groupements de développement agricole (GDA), indique Benoît Louchard. Ainsi, l’animateur local du GDA peut se déplacer chez l’agriculteur et répondre aux questions agronomiques. » Les conseillers utilisent également des outils de mesure placés au sol tels que les tensiomètres. Ce genre d’outil relève la teneur en eau des sols et identifie un éventuel stress hydrique.

Un OAD conseille sur la dose à apporter

En plus du conseil par le bilan hydrique, la chambre d’agriculture propose des bulletins de conseil en irrigation. Ils fournissent des informations générales sur les besoins des cultures, des points sur les éventuelles restrictions et des rappels fondamentaux en agronomie. Par exemple, le bulletin de conseil peut rappeler les stades sur lesquels les cultures sont le plus sensibles au stress hydrique. « Nous avons aussi plusieurs expérimentations en cours pour identifier les variétés économes en eau et connaître leurs besoins en fonction du stade de la culture », ajoute Benoît Louchard.

Depuis 2005, la chambre d’agriculture du Loiret expérimente un outil d’aide à la décision qui accompagne les agriculteurs dans leur stratégie d’irrigation. Le logiciel, appelé Net-Irrig et amélioré par Seabex en 2023, se cale sur la méthode du bilan hydrique. Cet outil informatique indique aux agriculteurs le moment le plus opportun pour irriguer (lire ci-dessous). Il conseille aussi sur la dose à apporter. « L’objectif de ce logiciel est d’éviter un apport insuffisant ou au contraire excessif qui conduit au drainage des sols, précise Benoît Louchard. Comparé aux méthodes classiques d’irrigation, le logiciel permettrait de faire des économies d’eau. Bien sûr, elles varient selon les irrigants et les années. » En effet, la chambre d’agriculture du Loiret estime que Net-Irrig peut faire économiser « jusqu’à 30 % des ressources en eau ».

Limiter l’impact du prélèvement

Outre l’accompagnement des agriculteurs, les chambres d’agriculture jouent aussi un rôle consulaire au niveau des territoires. En effet, « les organismes uniques de gestion collective attribuent un volume annuellement prélevable aux irrigants qui en dépendent, explique Benoît Louchard. Sur la nappe de Beauce, un volume global est donc réservé à l’irrigation agricole, un autre pour les usages économiques, un troisième pour l’alimentation en eau potable. Il ne doit jamais être dépassé. » Le volume prélevable se répartit ensuite équitablement entre les irrigants.

Toujours pour préserver la ressource, la chambre d’agriculture du Loiret a également mis en oeuvre un projet de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE). Établi sur le territoire de Puiseaux-Vernisson, le projet envisage de restaurer l’état global des masses d’eau. En lien avec la directive européenne cadre sur l’eau, différentes mesures sont prévues pour mettre à bien le PTGE. Plus largement à l’échelle du département, « la réutilisation des eaux usées traitées (REUT) en provenance des stations d’épuration est une source potentielle pour différents usages, telle que l’irrigation, explique Benoît Louchard. La  REUT limiterait ainsi l’impact du prélèvement dans les milieux et est à l’étude dans certains territoires. »

— Amélie DI BELLA (Tribune Verte 3022)

Romain Dufer : CONSEILLER EN IRRIGATION

« Je suis rentré à la chambre d’agriculture du Loiret en tant que conseiller grandes cultures puis je me suis orienté vers l’irrigation. En période hivernale, mes principales missions consistent à faire de la bibliographie et à rédiger les synthèses d’essais. L’hiver est aussi une période propice pour mettre à jour l’OAD Net-Irrig. Pour valider l’outil, nous vérifions chaque année les données des essais. Nous avons beaucoup travaillé dessus cet hiver mais à partir de maintenant nous n’aurons plus que des mises à jour à faire. Au cours de l’année, nous établissons cinq ou six bulletins d’irrigation pour l’ensemble du département. Nous abordons la climatologie, les enjeux techniques et la réglementation pour informer les agriculteurs. Nous faisons aussi un point sur la réserve en eau des sols, par culture et par période. D’autre part, j’anime cinq à dix formations chaque année auprès d’agriculteurs et de conseillers, dans le Loiret et d’autres départements. Entre 10 % et 20 % de mon temps est réservé aux tours de plaines auprès d’agriculteurs. En effet, j’interviens sur le terrain pour parler d’irrigation et de sol au sens large ou d’un sujet très précis s’il est demandé. En été, mes journées sont rythmées par la météo et la prise en compte des arrêtés en prévision pour adapter nos bulletins. »

Irrig par Seabex : UNE OAD POUR GÉRER SES TOURS D’EAU

Pascal Châtaignier est agriculteur irrigant dans le Loiret. Sur une surface de 150 ha, il cultive des grandes cultures et des porte-graines.

« J’utilise le logiciel depuis sa création. Net-Irrig fait économiser de l’eau mais pas tous les ans. Par exemple, l’année dernière on ne pouvait pas arrêter d’irriguer. Grâce au logiciel, je gère les irrigations, notamment pour le démarrage sur les céréales. Lorsque la sécheresse arrive, je sais par quelle parcelle je peux commencer à irriguer et lesquelles peuvent attendre. Je peux ainsi organiser mon tour d’eau. En cas d’orage d’été sur les cultures, le logiciel m’aide à prévoir le redémarrage de l’irrigation et on peut éviter un tour d’eau. Par exemple cette année, avec la restriction d’eau, je laisse descendre le réservoir un peu plus bas avant de relancer un tour d’eau. De la sorte je peux tenir toute la saison. Finalement il s’agit d’une économie que ce soit sur une culture ou sur une parcelle. »