François-Henri Champagne, analyste chez Citizen Capital : L'agriculture, terre fertile pour les start-up

François-Henri Champagne, analyste chez Citizen Capital : L'agriculture, terre fertile pour les start-up

Plus agiles et plus dynamiques que les grands groupes, les start-up sont particulièrement bien placées pour accompagner l’agriculture et l’alimentation dans leur quête de durabilité.

Pourquoi observe-t-on une « ébullition » dans le monde des start-up agricoles ?
François-Henri Champagne : Les consommateurs et les citoyens ont des attentes considérables vis-à-vis de l’agriculture et de l’alimentation. Le monde agricole doit répondre à leur demande d’une production plus durable, tout en nourrissant des populations toujours plus importantes. Il fait face à un besoin urgent de « faire mieux avec moins ». L’entreprise est un levier puissant pour adresser ces enjeux de transition.

Quels sont les différents atouts de ces entreprises ?
F-H. C. : L’un des principaux atouts de ces structures correspond au fait que l’agriculture est un secteur acyclique. Qu’importe ce qu’il peut arriver dans le monde, les gens auront besoin de manger. C’est donc un secteur qui, globalement, dispose d’un revenu assez stable et qui peut financer des solutions nouvelles. Par ailleurs, les agriculteurs sont une population très à l’écoute des innovations et des systèmes digitaux : on est loin des clichés ! Leur profession est très atomisée, mais structurée, avec des chambres d’agriculture, des interprofessions, des organismes de conseil, des coopératives, etc. Autant de relais pour des solutions apportées par les start-up.

Peut-on établir une typologie des startup agricoles ?
F-H. C. : Nous pouvons découper le secteur en trois parties : l’amont (la production), la transformation/logistique, et l’aval (la distribution). Dans la production, les nouveaux acteurs proposent généralement des solutions applicatives pour mieux gérer l’exploitation (agriculture connectée, de précision, OAD), de nouvelles machines ou des intrants inédits. Ils ont vocation à améliorer la vie des agriculteurs au quotidien. Dans la distribution, nous observons la mise en place de market place ou d’applications d’information comme Yuka. C’est dans la transformation et dans la logistique qu’il y a le moins de nouveaux acteurs, car il faut une logique de filière. Cette dernière est moins accessible aux petites entreprises.

Quelles sont les thématiques d’avenir ?
F-H. C. : Le sens de l’histoire, c’est « plus local, plus sain, plus transparent ». C’est pourquoi la maîtrise de la traçabilité, depuis la production jusqu’à la distribution, est une clé de la transition. Autre thématique tendance : le sol. Jusqu’à il y a peu, les pratiques agricoles se focalisaient sur la plante. Il y a de l’avenir pour les solutions de mesure et de caractérisation des sols. Pour les start-up existantes, même si le paysage est concurrentiel, il reste des parts de marché à conquérir, en France mais aussi en Europe. Une entreprise comme Sencrop, qui fait des capteurs météo connectés, a récemment procédé à une levée de fonds de 10 M€, ce qui est rare sur le marché !

Quels sont les profils pouvant plus facilement créer ou rejoindre ces start-up ?
F-H. C. : Ces dernières sont souvent créées par des personnes qui ont déjà exercé plusieurs années1. Nous y trouvons majoritairement des associations de profils généralistes avec d’autres plus agronomes. En matière de compétences, comme évoqué précédemment, je pense que des connaissances en sciences du sol sont intéressantes. Et bien sûr, les spécialistes en big data sont le nerf de la guerre.

—— Propos recueillis par Catherine PERROT (Tribune Verte 2949)
(1) Selon une étude du National bureau of economic research américain, l’âge moyen des fondateurs des start-up à succès est de 42 ans.

Zoom sur… CITIZEN CAPITAL

Né après la crise économique de 2008, le fonds d’investissement Citizen Capital a pour ambition d’accompagner les entreprises porteuses de projets ayant des impacts directs en matière sociale ou environnementale. Il est le pionnier français du « financement à impact ».