Égalité salariale : - 2 000 euros pour les diplômées ingé agri/agro

Égalité salariale : - 2 000 euros pour les diplômées ingé agri/agro

Avec des écarts de salaire hommes-femmes dès la sortie d’école autour de 2 000 euros brut, les ingénieures du secteur agri/agro ne font pas exception aux tendances observées pour l’ensemble des écoles d’enseignement supérieur en France.

Systématiquement, les diplômées femmes ont des « scores » inférieurs aux hommes, d’après les analyses genrées de suivi des promotions d’ingénieurs de l’Isara de Lyon de 2017 à 2020. Taux d’emploi net, taux de CDI et salaire brut annuel : sur tous ces critères, et quelle que soit l’année, les femmes sont « dépassées » par les hommes. Le salaire moyen de 2017 à 2020 est ainsi de 32 900 euros brut pour les hommes, contre 30 800 euros brut pour les femmes, soit plus de 2 000 euros brut d’écart, avec des décrochages plus ou moins élevés selon les années. L’écart se maintient, voire se creuse, après un et deux ans de vie active, d’après les enquêtes de l’école. Au-delà, aucune étude ne précise les chiffres. « Nous menons chaque année, comme toutes les écoles d’ingénieur et de management, des enquêtes sur le devenir de nos diplômés, pour les trois dernières promotions, soit un suivi sur trois ans par classe de diplômés », précise Isabelle Gagnaire, directrice des partenariats à l’Isara, qui rappelle que l’école compte 60 % de femmes pour 40 % d’hommes. Les résultats obtenus par l’Isara suivent les mêmes tendances que l’ensemble des écoles d’enseignement supérieur agricole, précise la responsable. « Tous les ans, nous mettons en commun nos enquêtes, afin de pouvoir nous comparer. » Les salaires médians toutes primes comprises pour les diplômés 2020 de 15 écoles d’agro en France, d’après le rapport « L’insertion professionnelle des diplômés de l’enseignement supérieur agronomique », étaient de 32 931 euros pour les hommes, contre 30 483 euros pour les femmes. Cet écart supérieur à 2 000 brut s’observe également pour la population plus large des ingénieurs tous secteurs confondus, issus du rapport de la conférence des grandes écoles (CGE) 2021, avec 37 753 euros pour les diplômés 2020 masculins, contre 35 400 euros pour les femmes.

Choix de métiers moins en tension

Principale hypothèse mise en avant par Isabelle Gagnaire pour expliquer cette différence : les femmes se positionneraient sur des métiers moins en tension que les hommes, et donc, moins bien rémunérés. « Nos enquêtes montrent qu’au sein d’un même domaine, par exemple l’agroalimentaire, les femmes ont tendance à s’orienter sur la qualité, la R&D, le marketing, alors que les hommes choisiront plutôt la production et le commerce, mieux payés. Ainsi, sur 2020, 50 % des diplômés hommes orientés en agroalimentaire ont opté pour un poste en production, avec un salaire moyen de 34 000 euros, alors que les femmes ont opté à 53 % pour des postes en qualité et en R&D, rémunérés en moyenne à 31 500 euros. » Pour la responsable de l’Isara, c’est donc un effet croisé qui explique les différences salariales : à la fois une rémunération de base encore inférieure pour les femmes, mais aussi un choix de postes moins valorisés. « Les femmes se mettent moins en avant, visent des postes moins challengeant, et négocient aussi moins leurs salaires », complète-t-elle.

Mieux négocier son embauche

Pour remédier à ces biais, l’Isara a mis en place des actions, principalement orientées sur la connaissance des métiers accessibles après le diplôme d’ingénieur agronome. « Nous proposons un travail sur les profils professionnels, et tout un tas de dispositifs pour avoir une vision claire du marché, des niveaux de salaire proposés et des responsabilités associées, afin de pouvoir négocier au mieux son embauche », insiste Isabelle Gagnaire, qui précise au passage que l’Isara a une « politique volontariste d’égalité homme-femme », avec un index de 81/100 en 2020, et de 90/100 en 2021. Pour la directrice des partenariats, elle-même diplômée de l’Isara en 1992, il est important pour les jeunes ingénieures agro d’intégrer le fait que leur diplôme a une valeur sur le marché. « Il ne faut pas craindre de se positionner sur des postes à responsabilités, avec des bons niveaux de salaires, comme se le permettent plus facilement les hommes. Les ingénieurs agro sont en plein emploi, et ce cursus est très apprécié des entreprises, d’où l’enjeu de ne pas se dévaloriser. En parallèle, nous abordons aussi le sujet de l’égalité salariale avec nos 150 entreprises partenaires et plus largement auprès des 400 entreprises chez qui nos étudiants réalisent des stages, afin de faire bouger les lignes », termine Isabelle Gagnaire.

— Olivier LÉVÊQUE (Tribune Verte 2979)

Les Glorieuses : EN 2021, #3NOVEMBRE9H22

Le 3 novembre à 9h22 : c’est la date à laquelle, en 2021, les femmes ont commencé à travailler gratuitement, indique Les Glorieuses, la newsletter féministe lancée en 2015 par Rebecca Amsellem, docteure en économie. Le constat est sans appel pour Les Glorieuses : 16,5 % d’écart salarial (d’après Eurostat, l’organisme de statistiques de l’Union européenne) au détriment des femmes cette année, soit 1 point de plus qu’en 2020. Rebecca Amsellem a ainsi lancé une pétition composée de trois propositions à l’attention des candidats et candidates à l’élection présidentielle : appliquer le principe d’éga-conditionnalité, afin de conditionner l’accès aux marchés publics, subventions publiques et prêts garantis par l’État au respect de l’égalité salariale au sein de sa structure ; revaloriser les salaires des emplois où les femmes sont les plus nombreuses (par exemple, les femmes représentent en France 90,4 % des infirmières, 87,7 % des sage-femmes et 65,7 % du corps enseignant) ; et enfin soutenir un congé parental payé de manière équivalente pour les deux parents.

L’INDEX D’ÉGALITÉ OBLIGATOIRE POUR LES ENTREPRISES DE PLUS DE 50 SALARIÉS

Si depuis 2019, toutes les entreprises de plus de 250 salariés devaient publier leur index de l’égalité professionnelle entre les femmes et les hommes (note globale sur 100) au 1er mars, la règle s’applique depuis 2020 à toutes les entreprises de plus de 50 salariés. Cet index regroupe 4 indicateurs :

  • l’écart de rémunération homme-femme ;
  • l’écart du taux d’augmentation individuelle homme-femme ;
  • le pourcentage de salariés augmentés à leur retour de congé maternité ;
  • le niveau de parité homme-femme parmi les 10 plus hauts salaires de l’entreprise.

Index d’égalité professionnelle : 96/100 POUR VILMORIN-MIKADO

Avec un index d’égalité professionnelle de 96 en 2021, identique à celui de 2020, l’entreprise semencière Vilmorin-Mikado fait figure d’exemple sur l’équilibre de rémunération entre femmes et hommes. « Ce dossier n’a pas été particulièrement travaillé en interne, car les choses étaient faites assez naturellement, évoque Sébastien Conte, DRH de Vilmorin-Mikado. Depuis une dizaine d’années cependant, nous veillons à intégrer ce volet dans les décisions d’entreprise, notamment pour les promotions à tous les niveaux, et à corriger d’éventuels écarts. » Pour le groupe fort de plus de 1 000 salariés, dont 50 % sont basés en France, l’enjeu est de se maintenir à un haut niveau de l’égalité professionnelle femme-homme sur l’hexagone. « Il nous est difficile de faire beaucoup mieux sur l’index aujourd’hui. Nous pourrions d’ailleurs reculer potentiellement, suite à une baisse de score sur un des 5 critères, par exemple, pour une non-augmentation de salaire pour une salariée par manque de compétence et non en lien avec son genre. Idem si l’on remplace une femme par un homme au sein des dix postes à plus haute rémunération, là aussi en lien avec la compétence. » Plutôt que d’atteindre le plus haut score sur l’index, Vilmorin-Mikado s’assure surtout que l’égalité femme-homme est une notion partagée par chacun de ses salariés. « Nous faisons de la pédagogie, notamment auprès des managers, hommes comme femmes », poursuit le DRH. Pour autant, l’argument n’est pas mis en avant lors des recrutements. « Notre secteur d’activité est traditionnellement ouvert aux femmes, qui y ont une place importante. Si nous pouvons améliorer la politique d’égalité salariale, c’est principalement sur nos sites à l’étranger, ou lors d’acquisition de nouvelles sociétés, qui n’ont pas toujours une politique aussi vertueuse en matière d’égalité. »